Le site hivtravel.org a été créé en Suisse. En 1996, le centre de documentation Sida Info Doc Suisse a demandé au département des affaires étrangères de l’époque s’il existait d’autres pays que les Etats-Unis qui refusaient l’entrée aux personnes séropositives. En effet, il y en avait encore quelques-uns – la Russie, la Chine, presque tous les pays du Proche-Orient, pour n’en citer que quelques-uns. C’était un tableau globalement effrayant. En tant que jeune homme de 35 ans, j’ai été bouleversé, car j’avais surtout voyagé durant toute ma vie professionnelle et j’avais aussi très souvent voyagé à l’étranger.

J’ai tout de suite compris qu’il fallait, premièrement, rendre ces informations disponibles en anglais et, deuxièmement, les mettre en ligne. C’est ce que j’ai fait pour la première fois en 1998 sur le site web de Sida Info Doc. En même temps, la Deutsche Aidshilfe publiait un aperçu similaire dans un recueil de sources imprimé. Celle-ci était encore plus complète que l’aperçu suisse grâce au grand réseau diplomatique de l’Allemagne. Je me suis rendu à Berlin, j’ai rencontré l’auteur Peter Wiessner et nous avons décidé de mettre nos données en commun et de les tenir aussi à jour que possible. Notre objectif principal était d’informer les personnes vivant avec le VIH. En même temps, nous voulions rendre le problème visible et mobiliser la société civile.

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Des pratiques hétérogènes selon les pays et la durée du séjour

Déjà à l’époque, il n’y avait aucune raison rationnelle d’interdire aux personnes vivant avec le VIH de voyager ou d’immigrer. Assez rapidement, je me suis rendu compte que les pays qui interdisaient l’entrée sur leur territoire avaient du mal à les faire respecter. Même dans les pays où les visas étaient obligatoires, il n’était guère nécessaire de présenter une preuve de santé pour les séjours de courte durée comme le tourisme ou les voyages d’affaires. Dans la pratique, un tel document était généralement trop compliqué. Il est également frappant de voir comment des pays fortement dépendants du tourisme fermaient les yeux sur les séjours de moins de 90 jours, mais ne faisaient preuve d’aucune pitié envers les personnes qui avaient besoin d’un permis de travail ou d’études. Il ne faut pas beaucoup d’imagination pour se rendre compte de l’absurdité de cette logique.

La levée de l’interdiction d’entrée aux Etats-Unis en 2010 : une étape importante

La collecte de données nous a aidés à supprimer les quelques restrictions en Europe. Ce sont surtout les pays d’Europe de l’Est, qui ont rejoint l’UE à partir de 2004, qui posaient des problèmes. La Commission européenne et son forum VIH pour les acteurs publics constituaient alors la plate-forme centrale que nous pouvions utiliser. A partir de 2008, l’ONUSIDA a enfin pris conscience du problème et une équipe spéciale a été mise en place. Cette équipe a servi de plateforme de discussion pour aider les pays ayant des restrictions à les supprimer. En 2010, une grande coalition d’acteurs a réussi à faire disparaître l’interdiction d’entrée aux États-Unis. D’autres pays ont suivi l’exemple, comme la Bulgarie, la Namibie, l’Inde et l’Ukraine, la Corée du Sud, la Nouvelle-Zélande et finalement même la Chine.

Après la fermeture de Sida Info Doc Suisse en 2003, le site Internet a survécu tant bien que mal. Finalement, l’International AIDS Society IAS nous a trouvé une nouvelle patrie à partir de 2009. Depuis lors, le site web très utilisé avait pris de l’âge.

Certains utilisateurs se sont donc demandé si le site était encore d’actualité. Grâce à de petits financements intermédiaires, nous avons pu maintenir les contenus à jour. Il n’y avait pas d’argent pour le maquillage et la mise en page.

De hivtravel.org à Positive Destinations

La conférence IAS de 2023 à Brisbane a finalement permis une percée. Des collègues australiens avaient mis sur pied un forum sur la migration, notamment pour faire pression sur leur propre gouvernement. Les contacts noués à l’époque ont permis de réviser en profondeur le site d’information et de l’adapter aux besoins actuels des personnes vivants avec le VIH. Le nouveau site web Positive Destinations a vu le jour sous l’égide du réseau HIV-Justice Network, actif au niveau mondial. Le nouveau foyer comblera une lacune importante – l’activisme mondial visant à supprimer les barrières existantes sera poursuivi de manière renforcée.

David Haerry / mars 2025

L’auteur remercie Peter Wiessner et l’International AIDS Society pour tant d’années de collaboration. Gilead Sciences soutient le HIV Justice Network et assure ainsi l’avenir du site d’information.